N’deye Coumba Mbengue était engagée pour les droits des femmes et des enfants au Sénégal. Elle rencontre et se lie d’amitié avec l’équipe de Paroles Indigo lorsqu’en 2021, lors d’une édition sénégalaise du festival, celle-ci intervient dans la crèche où elle travaillait alors. Créant par la suite sa propre structure d’accompagnement dans la région de Saint-Louis, elle décroche un partenariat avec Sciences Po Lyon, qui l’invite en France pour appuyer et développer son projet naissant. Mais comme beaucoup de jeunes du continent, elle voit son visa refusé. Une décision qui anéantit la jeune femme mais ne le détourne pas de son objectif. Embarquée dans une pirogue avec l’espoir d’atteindre son mais, elle disparaît en mer, avec tous les passagers en quête d’un ailleurs. “À Coumba ainsi qu’à tous ces jeunes africains courageux, victimes d’une absurde assignation à résidence, coupables de l’avoir défiée au risque de leur vie”, la 11e édition du festival Paroles Indigo est dédiée.
Une édition 2024 qui fait la part belle aux auteurs et artistes du Cameroun et du Sénégal, parmi lesquels l’auteur et historien Mamadou Diouf, enseignant à l’université Columbia à New York où il dirige l’Institut d’études africaines. C’est le titre de son dernier ouvrage, L’Afrique dans le temps du monde, que le festival a choisi comme thème et fil conducteur de la semaine de rencontres et de réflexion qui s’ouvre ce mardi 29 octobre à Saint-Martin- de-Crau et à Marseille, avant de dérouler son programme à Arles jusqu’à dimanche. Intellectuel majeur, Mamadou Diouf sera présent à Arles pour une conférence, samedi après-midi, autour de son livre, à travers lequel il aborde la question de l’écriture de l’histoire, démontrant “comment l’Afrique est bel et bien inscrit de par son histoire dans le temps du monde, explique Isabelle Grémillet, directrice artistique de Paroles Indigo. C’est une approche très accessible même si l’on n’est pas spécialiste de l’Afrique”. Un livre édité par la maison Ròt-Bò-Krick, dédié notamment à la pensée décoloniale et qui sera elle aussi présente pendant le festival.
Parmi les autres personnalités invitées, l’auteur jeunesse camerounais Alain Serge Dzotap, l’un des rares du continent à être traduit en plusieurs langues, animera des ateliers d’écriture pour les enfants de 7 à 11 ans. Son compatriote Christian Epanya, auteur et illustrateur lui aussi pour les jeunes lecteurs, est également à l’affiche de Paroles Indigo. “Ce sont vraiment les deux points dans leur domaine”, souligne Isabelle Grémillet. Toujours sous les couleurs du Cameroun, la photographe Sarah Dauphiné Tchouatcha viendra présenter, avant son exploitation commerciale, le film qu’elle a coréalisé autour de l’œuvre de Mongo Beti, auteur d’un livre marquant sur le pillage économique de son pays, Main basse sur le Cameroun, et auquel un hommage sera rendu à l’École nationale supérieure de la photographie.
Autre pays africain mis en lumière pour sa dynamique créative, le Sénégal est représenté par Pathé Dièye. L’auteur, poète et slameur dirigera un atelier de poésie samedi et dimanche au musée départemental Arles antique, clôturé par une restitution publique. Un travail mené avec la complicité de la Sénégalaise Hajar Pourmera Thiam que l’on entendra par ailleurs au cours de différentes conférences et à l’occasion de la 6e édition du programme Lycéen.ne.s Poètes, du 4 au 8 novembre dans des établissements d’Arles et de Tarascon.