Après une semaine de débats, dans la nuit de samedi, les députés ne sont pas parvenus à terminer les plus de 1500 amendements restants. Le vote solennel prévu mardi après-midi sera très probablement rapporté.
Reculer pour mieux sauter ? Ce samedi soir, à minuit, après une semaine de débats sur la partie «recettes» du projet de loi de finances, les députés ne sont pas parvenus à terminer l’examen des plus de 1500 amendements qu’il leur restait à débattre. Alors que les discussions ne seront pas ouvertes dimanche et que l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale doit débuter lundi après-midi, les débats sur le budget sont donc pour l’instant suspendus. Et le vote solennel, initialement prévu mardi après-midi après les questions au gouvernement, n’aura très probablement pas lieu.
Samedi soir, la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, a précisé que la conférence des présidents, qui se déroulera mardi matin à 10h, devrait vraisemblablement déterminer une date de reprise pour la suite des débats pour cette première partie du budget pour 2025. «Mon souhait est que le débat ait lieu et que l’ensemble des amendements puisse être examinés», a indiqué le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, en ouverture de cette dernière séance. Avant d’ajouter : «Je suis à votre disposition par définition, ce soir, demain, la semaine prochaine, le week-end prochain s’il le faut».
Risque d’un texte rendu «hors délai»
Ce retard devrait avoir des conséquences sur l’examen de l’ensemble des textes budgétaires. Puisque désormais, alors que la seconde partie du projet de loi, qui concerne les « dépenses », devait débuter le 5 novembre, ce sera normalement la suite de la partie « recettes » qui sera débattue. De quoi faire craindre un texte rendu «hors délai» ? «Si on est aussi longs sur la seconde partie que sur la première, il y a des chances», craint un cadre macroniste. L’article 47.1 de la Constitution prévoit en effet que l’Assemblée nationale dispose de 40 jours pour examiner l’ensemble du budget. Si ce n’est pas le cas, c’est le texte du gouvernement qui est envoyé au Sénat, qui a de son côté 15 jours pour légiférer.
Ensuite, une commission mixte paritaire, réunissant sept députés et sept sénateurs tente de se mettre d’accord sur les différents points du texte, avant que celui-ci ne revienne à l’Assemblée puis au Sénat pour le vote final. C’est à ce moment-là, au vu de la situation politique au Palais Bourbon, que le premier ministre, Michel Barnier, envisage de dégainer l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter son budget. Et se risquera alors à une motion de censure des oppositions, qui pourrait alors renverser le gouvernement. Si par hasard le texte dépassait un délai de 60 jours entre l’Assemblée et le Sénat sans parvenir à être voté, l’exécutif aurait alors la possibilité de faire passer ce projet de loi par le biais d’ordonnances.
Le texte gouvernemental complètement dénaturé
Si l’examen du texte gouvernemental n’est pas encore terminé, il est en tout cas déjà totalement dénaturé. Les députés ont par exemple rejeté la surtaxe sur les grandes entreprises, après que celle-ci avait été largement augmentée par la gauche. Les parlementaires de la Chambre basse ont également supprimé un article prévoyant d’alourdir le «malus» pour les voitures essence et diesel. La hausse de la fiscalité sur l’électricité a même été abrogée par les députés macronistes eux-mêmes.
Très mobilisée dans l’Hémicycle, la gauche a réussi à obtenir un nombre important de victoires, même si elle n’a pour l’heure pas réussie à remanier le texte autant qu’elle l’avait fait lors de l’examen en commission des finances. Elle est notamment parvenue à faire voter un impôt sur le patrimoine des milliardaires, à créer une contribution exceptionnelle sur les dividendes des entreprises du CAC 40, à rendre pérenne la contribution exceptionnelle demandée aux entreprises de fret maritime, et à plafonner à 500 millions d’ euros la niche fiscale ne bénéficie pas ce secteur. Ces modifications ne sont toutefois que temporaires : elles ne seront pas adoptées si l’ensemble de la partie «recettes» est retoqué lors du vote solennel, lorsqu’il aura lieu. Par ailleurs, la majorité sénatoriale, de droite, aura tout loisir, lors de la navette parlementaire, de remanier à son tour le projet de loi. Pour l’instant, il faudra en tout cas patienter.