En République démocratique du Congo, le cri « Ali, boma ye » (ndlr, le mot « boma ye » vient du lingala et signifie « Tue-le ») résonne toujours dans la capitale congolaise. Il a pourtant 50 ans ! Un cri qui a célébré la victoire, le 30 octobre 1974, de l’ancien champion du monde poids lourds, Mohamed Ali, contre le tenant du titre, George Foreman. Une première pour le continent africain d’accueillir un combat de cette envergure. Un combat qui inspire toujours les jeunes boxeurs congolais… Reportage.
De notre envoi spécial à Bangula,
« Ici, c’est tout ce que j’ai pu garder comme archives personnelles… ». Dans une boîte en carton jaune par le temps, Pierre Célestin Kabala conserve précieusement des photos et affiches du « combat du siècle ». « C’est la première affichette pour annoncer le combat », montre-t-il fièrement.
Cela fait 50 ans que Mohamed Ali a vaincu George Foreman dans le stade de Kinshasa. À l’époque, le journaliste avait 27 ans et était au bord du ring. Il n’a rien oublié du combat. « Huitième tour, vers quatre heures du matin, Ali a multiplié ses jabs et ses crochets, se souvient-il. Il l’a mis tellement à terre… Tout le stade scandalait ” Ali, boma ye ! Ali, boma toi !”. »
Après le combat, les clubs se multiplient
Un chant devenu mythique qui résonne encore à Kinshasa. Judex Tchibandawata est le fondateur du club de boxe La Tête Haute. Il explique que c’est la victoire de Mohamed Ali qui a rendu populaire la boxe dans le pays : « Il n’y avait pas beaucoup de clubs de boxe, il n’y en avait que trois. Moi, j’ai formé le quatrième club. La valeur de Mohamed Ali… Après ça, il y a beaucoup de clubs qui ont commencé à naître. Maintenant, nous comptons plus de 300 clubs. C’est toujours grâce à l’inspiration de Mohamed Ali à Kinshasa. »
Comme un symbole, ses jeunes boxeurs s’entraînent sur le parvis du stade Tata Raphaël (nommé stade du 20 Mai à l’époque) où s’était tenu le combat du siècle.
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« Sur un suivi de nos frères »
Si le passage de Mohamed Ali dans le pays aura été bref, il aura marqué de nombreuses générations de Congolais. Comme Honoré Modabi, entraîneur de boxe : « Nos aînés, qui ont vu Mohamed Ali boxer, ont eu le goût de boxer. Nous aussi, on a suivi nos frères et nos grands frères pour venir encore boxer au stade. Quand on a un combat, on s’inspire des images de Mohamed Ali : on regarde ses combats, comment il courait, comment il faisait son sparring… On se prépare en fonction de Mohamed Ali. »
Safi Lukomo n’était pas née en 1974, mais le combat, elle le connaît par cœur : « J’aime le style de Mohamed Ali. C’est un défenseur. Je vois qu’il n’est pas cogneur, c’est un styliste ! »
Dans ce club, chaque boxeur combat avec l’espoir de devenir le prochain Mohamed Ali congolais.
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