En République démocratique du Congo (RDC), le franc congolais a perdu 21% de sa valeur depuis le début de l’année. Densément riche en minéraux, le pays dispose d’une économie tournée vers l’extérieur et peine à réaliser son budget annuel de 16 milliards de dollars. L’inflation a pris probablement 25% en un an et pourrait ne pas s’arrêter là, selon les experts.
De notre correspondant à Kinshasa,
Sur l’avenue de l’hôtel, près du grand marché, le plus grand carrefour des changeurs de monnaie. Ici, chacun entasse des briques de francs neufs sur sa table de fortune, mais ce que beaucoup recherchent, c’est la bonne monnaie, le dollar. Pour le cambiste Claude, la chute de la monnaie est bien réelle.
« Au mois de janvier, on était à 2 100 francs congolais et aujourd’hui, nous sommes à 2 450 francs congolais contre le dollar, à la vente, on peut arriver jusqu’à 2 500 francs congolais. Il y a vraiment une dépréciation à grande échelle. », constate-t-il. « C’est peut-être parce que le gouvernement commence à payer dettes intérieures parce que pendant un certain moment, il y avait une accumulation de dette intérieure. Il y a eu un afflux du franc congolais sur le marché, une hausse jusqu’à ce qu’on est arrivé même jusqu’à 2 700 francs pour un dollar, voire même 2 750, c’était devenu de la spéculation. »
Sur le marché, les prix ont explosé. Dans cette boutique près de la mosquée de Kintambo, les prix fixes en dollars sont restés stables tandis qu’en franc, ils ont grimpé. 90 % des biens sont importés.
« Ces produits, comme ils sont importés, ils importent aussi leur inflation, comme l’huile qui a subi une augmentation de 100 %. Au début de l’année, autour de 3 500 francs le litre, aujourd’hui cela se vend à 6 500 francs », déclare Philémon, le gérant de la boutique. « Il y a aussi le foufou qui a subi l’ordre de 40 % d’augmentation en comparaison avec le prix du début de l’année. »
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Un déficit budgétaire d’environ 4 milliards de dollars
Pour tenter de revaloriser le franc, la Banque centrale a injecté 150 millions de dollars sur le marché de change. Une alternative très limitée pour le professeur Noel Tshiani, ancien directeur à la Banque mondiale. Il accuse le gouvernement d’utiliser la planche à billet pour couvrir le déficit budgétaire d’environ 4 milliards de dollars à ce jour.
« Nous sommes mal partis. D’ici avant la fin de l’année, un dollar va se changer à 3 000 francs congolais, créant ainsi une situation de misère sociale incroyable », alerte Noël Tshiani. « L’économie est dollarisée à 95 %. Par conséquent, tous ces instruments de politique monétaire qu’on peut déployer, notamment, sur a augmenté le taux directeur de 9 à 11 % et de 11 à 25 % en moins de deux mois, sur a augmenté le coefficient de réserves obligatoires de 0 à 10% sur les dépôts en franc congolais. »
Puis il ajoute : « Tous ces instruments-là sont inefficaces. Par conséquent, cela laisse le reste de la masse monétaire augmentée. Je peux voir la dépréciation se prolonger comme si de rien n’était. »
L’enseignant propose notamment à l’État d’ajuster son train de vie à la capacité de mobilisation de recettes, industrialiser le pays pour réduire la facture d’importation, réformer le Code minier pour rapatrier les devises et créer des banques commerciales congolaises.
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