Par Coralie Durand Publié le 27 oct. 2024 à 14h00
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C’est un signe. Lorsque Emmanuel Mary, spécialiste du patrimoine de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), vous indique qu’à lui aussi, le nom d’Odette du Puigaudeau est longtemps resté inconnu, on sait que les abîmes de l’oubli étaient bien profonds. Pourtant, c’est bien dans la cité navale que l’exploratrice, journaliste, ethnologue, est née le 20 juillet 1894. Pourtant, c’est bien cette Nazairienne qui a défié les règles d’une époque corsetée par le patriarcat pour faire découvrir des peuples d’Afrique. Aujourd’hui, Saint-Nazaire rend hommage à l’enfant du pays grâce à une exposition exceptionnelle, baptisée « Le sel du désert ».
L’exposition Le Sel du Désert est visible à la galerie des Franciscains ©Coralie DURAND
Une thèse qu’elle ne pourra pas soutenir
Dans la Galerie des Franciscains, on découvre ainsi toutes les facettes d’une vie si riche qu’on a du mal à en faire le tour. Avant ses voyages en Afrique, Odette du Puigaudeau a en effet été dessinatrice, styliste, journaliste. C’est à partir des années 30 qu’elle commencea ses grandes expéditions dans le Sahara Occidental.
« Elle et sa compagne, Marion Senomes, vont vivre avec les populations et montrer ce que seules les femmes peuvent voir », note Emmanuel Mary.
La Nazairienne travaillera le sujet jusqu’à sa thèse, Art et coutumes des Maures, mais elle ne pourra pas la soutenir.
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À cause de son militantisme anticolonialiste et son engagement contre les essais nucléaires, l’État lui a retiré ses crédits. C’est le Maroc qui la fera éditeur.
Emmanuel Marie
Avec une préface de Théodore Monod, l’un des seuls à reconnaître son talent. Alors que l’Afrique mettra toujours en valeur ses nombreux récits de voyage – de nombreuses écoles et présage son nom -, l’Europe, elle, a relégué son travail au fond des tiroirs.
Monique Vérité (ici avec l’artiste Mamadou Sall) est la dernière personne à avoir connu l’exploratrice ©Coralie DURAND
Le retour à la lumière grâce à une rencontre
S’il revient actuellement à la surface, c’est grâce à une personne : Monique Vérité. Alors qu’elle revient d’un voyage en Mauritanie, au début des années 80, la chercheuse s’intéresse au travail d’Odette du Puigaudeau, mais on lui dit alors que l’autrice est décédée. Par le plus grand des hasards, elle la retrouve, bien vivante, habitant à Rabat, au Maroc.
Je suis allée la voir une première fois en 1985, et puis, on s’est revus trois fois par an. Elle m’a laissée tous ses carnets à libre disposition. C’est une chance, je ne voulais pas écrire de biographie héroïque.
À côté de l’expo
L’exposition « Le sel du désert » est visible jusqu’au 1er décembre 2024 à la Galerie des Franciscains, les mercredis, samedis et dimanches, de 14 h à 18 h ; les jeudis 24 et 31 octobre, de 14 h à 18 h ; les vendredis, de 14 h à 20 h.
D’autres événements liés à l’exposition sont également organisés, comme la veillée saharienne, tous les vendredis à 19 h. Le documentaire de Gérard Uginet, Odette du Puigaudeau, l’aventurière inattendue, sera projeté mardi 19 novembre à 20 h 30, au Cinéville.
Samedi 23 novembre, Monique Vérité tiendra une conférence sur l’exploratrice pour le Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié des Peuples (Mrap). Cela se passera salle 7 de la Maison des Associations (gratuit).
Tous les objets que l’on découvre dans l’exposition, Monique Vérité les a récupérés au fil des ans.
Elle m’avait aussi donné des photos et des articles, pour que j’en fasse la publicité, disait-elle. C’était important pour elle de montrer toute une culture nomade qu’elle a voulu faire connaître.
Le fonds, lui, se trouve à la BNF (Bibliothèque nationale de France). Prêt à servir à toute une nouvelle génération de chercheurs qui saura lui rendre justice.
Odette du Puigaudeau est décédée à Rabat en juillet 1991.
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