Rodri a remporté le Ballon d’or 2024 lors d’une cérémonie organisée lundi au Théâtre du Châtelet de Paris. Une consécration pour le milieu de terrain de Manchester City, humble et travailleur, qui préserve son intimité loin des rectangles verts. A 28 ans, le taulier espagnol n’est pas sur les réseaux sociaux et passe la plupart de son temps avec ses proches. Aux côtés notamment de sa compagne Laura Iglesias.
Il a eu du mal à retenir ses larmes lorsque George Weah a prononcé son nom sous les acclamations de la salle. Rodri est apparu très ému au moment de décrocher le Ballon d’or 2024 lundi soir au Théâtre du Châtelet. Vêtu d’un costume sombre, le milieu de terrain de Manchester City, touché au genou et probablement forfait pour le reste de la saison en cours, s’est déplacé avec des béquilles pour monter sur scène. Et s’exposer en pleine lumière aux yeux du monde.
Sur le terrain, le taulier de l’équipe d’Espagne en a l’habitude. En club ou en sélection, le joueur de 28 ans brille dans l’entrejeu avec sa technique sereine, sa force physique et son charisme naturel. En dehors du rectangle vert, en revanche, Rodri est particulièrement discret. Contrairement à la plupart de ses collaborateurs, le natif de Madrid ne montre quasiment rien de sa vie privée. Il n’a d’ailleurs aucun compte sur les réseaux sociaux. Seuls ses fans alimentent certaines pages à son effigie, sans avoir grand-chose à raconter en dehors de ses exploits sportifs.
“Je ne suis pas un gars des réseaux”
Après avoir débuté au Rayo Mahajadonda, Rodrigo Herandez Cascante (son nom complet) a rejoint le centre de formation de l’Atlético de Madrid à l’âge de 11 ans, avant de lancer sa carrière professionnelle à Villarreal, de revenir à l’Atlético et de s’affirmer chez les Citizens à partir de 2019. Jusqu’à devenir le meilleur joueur du monde. Le premier à soulever le Ballon d’or après la fin du règne de Lionel Messi et Cristiano Ronaldo, qui n’étaient pas dans les 30 nommés cette année. Deux superstars dont le quotidien est commenté aux quatre pièces de la planète, loin de la vie pudique de Rodri.
“Je ne suis pas un gars des réseaux, c’est pour ça que les gens ne me connaissent pas beaucoup”, explique celui qui a grandi à Villafranca del Castillo, à 25km à l’ouest de Madrid. “Je suis quelqu’un d’assez simple. J’essaye de profiter de la vie jour après jour, d’être un leader dans mon équipe, de m’améliorer en tant que personne et en tant que joueur (…) Je suis un homme normal, pas du tout excentrique, qui essaie de faire de son mieux.”
Une Opel Corsa d’occasion et un téléphone un peu utilisé
Lors de ses débuts à Villarreal, Rodri est venu à l’entraînement avec une Opel Corsa d’occasion rachetée à une vieille dame pour près de 3.000 euros et un téléphone portable un peu utilisé. Sans se des remarques ou des sourires moqueurs. Il s’arrachait d’ailleurs les cheveux en apprenant les sommes dépensées par certains joueurs pour s’offrir des voitures de luxe. L’anecdote résume la personnalité du bonhomme, peu attirée par les strass, les paillettes et les mondanités. “C’est le Ballon d’or de la normalité”, selon une formule de la presse espagnole. Au moment de recevoir son prix, le meilleur joueur de l’Euro 2024 a d’ailleurs fait référence à Andrés Iniesta, un autre artiste de l’ombre.
Laura Iglesias, sa compagnie depuis l’université
Mais Rodri a commencé son discours en remerciant « la personne la plus importante dans sa vie » : sa compagne Laura Iglesias. “Sans toi, ce chemin n’aurait pas été le même. Merci infiniment”, at-il déclaré à celle qui partage son quotidien depuis huit ans (ils n’ont pas d’enfant). “C’est notre anniversaire aujourd’hui”, a même précisé le guide de la Roja, dans une rare confidence sur son couple. Rodri a rencontré Laura lorsqu’il étudiait le commerce, l’économie et la gestion des entreprises à l’université Jaume I située à Castellon de la Plana, à soixante-dix kilomètres au nord de Valence.
La jeune femme suit elle des études de médecine et espère devenir chirurgienne. Elle est aussi très réservée sur la toile. Elle possède un compte Instagram mais il est privé et seuls ses proches y ont accès. Laura apparaît tout de même de temps en temps en public au bras de son homme, comme en mai dernier dans les tribunes de Roland-Garros. C’est en tout cas sa première supportrice. “Quand je marque un but, j’ai toujours une vidéo de Laura qui célèbre à la maison et je la regarde dans le vestiaire après le match”, glisse Rodri.
“C’était bizarre de le voir jouer au ping-pong et faire sa lessive”
Alors qu’il était en train de percer chez les jeunes de Villarreal, Rodri a vécu un certain temps en résidence universitaire à Castellon de la Plana. Avec l’envie d’être un étudiant ordinaire. “Au début, les gens étaient choqués lorsqu’ils voyaient Rodri, qui jouait avec un club de première division mais qui vivait toujours là”, a confié son ami Valentin Henarejo à Marca. “C’était bizarre de le voir jouer au ping-pong ou faire sa lessive. Mais au bout d’un moment, c’est devenu normal. Il se mélangeait avec les autres. Il aimait être avec ses amis et s’assoir sur le canapé avec tout le monde.” Pablo Alvarez, l’un de ses coéquipiers à Villarreal, abonde : “La vie de Rodri n’était pas que dans le football”.
Le même agent que Pablo Sarabia
Pablo Barquero est bien placé pour le savoir. Cet agent, qui opère dans l’anonymat, gère les intérêts de Rodri depuis qu’il a 13 ans. A l’heure actuelle, il ne s’occupe d’ailleurs que du nouveau Ballon d’or et de son compatriote Pablo Sarabia, l’ailier de Wolverhampton passé par le PSG. Rodri lui a rendu un hommage soutenu lors de la soirée du Ballon d’or : “Qui aurait pu croire qu’on se retrouvait là Pablo ? Quand tu venais me chercher pour aller aux matchs, avec cet amour inconditionnel, ce soutien incroyable et la poursuite des mêmes rêves que moi, c’est-à-dire atteindre les sommets…”
Des cimes que Rodri a failli ne jamais apercevoir, comme il l’a lui-confié au Théâtre du Châtelet : “A 17 ans, j’ai fait mes bagages pour rejoindre Villarreal et jouer en Liga. C’était un rêve. Jamais je n’aurais cru que ce serait possible. Et je me souviens de ce jour où je me suis dit : ‘Ça suffit’. pas continuer, que j’avais fait tous ces efforts pour atteindre ce rêve et qu’il était en train de s’effriter. Mais mon père m’a dit : ‘Non, non, on ne jette pas l’éponge comme ça. On n’est pas arrivés jusque-là pour rien. On va serrer les dents’. Ce jour-là, ma mentalité a changé Et ça m’a amené ici. valeurs, qui essaie de faire les choses bien et qui ne se préoccupe pas des clichés du foot, peut atteindre le sommet.”
Sanctionné pour un dérapage sur Gibraltar
Croyant, travailleur et persévérant, l’unique buteur de la finale de la Ligue des champions entre Manchester City et l’Inter (1-0) n’a pas l’habitude de se mettre en avant. Mais il ne manque pas de caractère pour autant. “Je suis très calme jusqu’au moment où je m’énerve. Je crois que c’est ce qui me décrit le mieux”, confirme l’intérêt. Capable de critiquer le jeu de ses adversaires après un match, Rodri peut aussi montrer les muscles sur le gazon. Quitte à perdre ses nerfs, comme lors de la première exclusion de sa carrière l’an passé en Premier League, après un gros accrochage avec Morgan Gibbs-White de Nottingham Forrest.
Malgré son air de genre idéal, Rodri peut aussi déraper. Lors des célébrations de l’Euro 2024, il a été filmé avec Alvaro Morata en train de scander “Gibraltar est espagnol” (la péninsule située au sud de l’Espagne est un territoire britannique). Après une plainte de l’UEFA et de la Fédération gibraltarienne, il a écopé d’un match de suspension pour ses propositions jugées “provocateurs” et “insultants”.
Porte-parole de la fronde contre le calendrier surchargé
Le mois dernier, le régulateur des Skyblues n’a pas hésité non plus à dénoncer publiquement un calendrier international toujours plus chargé. En faisant planer la menace d’une grève des joueurs. “Si ça continue comme ça, à un moment, on n’aura pas d’autre choix”, at-il lâché en conférence de presse. “Si vous posez la question à n’importe quel joueur, il vous le dira. C’est une opinion générale parmi les joueurs, ce n’est pas juste l’avis de Rodri.”
Quelques jours plus tard, il s’est gravement blessé au genou lors d’un match contre Arsenal (2-2). En attendant de poursuivre sa convalescence, le meilleur joueur du monde va pouvoir désormais savourer son Ballon d’or, avec qui il avait prévu de dormir à Paris. Il profitera ensuite de ces longues semaines sans crampons pour “passer du temps en famille”. Tranquillité. Sans live, ni histoires. Comme à son habitude.