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Légende image, Le Kremlin affirme que ce sommet est l’un des « événements de politique étrangère les plus importants jamais organisés » en RussieInformation sur l’articleAuteur, Steve RosenbergRôle, Rédacteur en chef pour la Russie
22 octobre 2024
Imaginez que vous êtes Vladimir Poutine.
L’Occident vous a qualifié de paria pour avoir envahi l’Ukraine. Des sanctions visent à couper l’économie de votre pays des marchés mondiaux.
Un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale a été lancé contre vous.
Comment pouvez-vous montrer que la pression ne fonctionne pas ? En organisant un sommet.
Cette semaine, dans la ville de Kazan, le président Poutine accueillera plus de 20 chefs d’État au sommet des économies émergentes des Brics. Parmi les dirigeants invités figurent le chinois Xi Jinping, le Premier ministre indien Narendra Modi et le président iranien Masoud Pezeshkian.
Le Kremlin a déclaré qu’il s’agissait de l’un des « événements de politique étrangère les plus importants jamais organisés » en Russie.
« Le message clair est que les tentatives d’isolement de la Russie ont échoué », estime Chris Weafer, associé fondateur de la société de conseil Macro-Advisory.
« Le message du Kremlin consiste en grande partie à dire que la Russie résiste aux sanctions. Nous savons qu’il y a de graves fissures sous la surface. Mais au niveau géopolitique, la Russie à tous ces amis et ils seront tous ses partenaires ».
Qui sont donc les amis de la Russie ?
Les Brics signifient Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud. Ce groupe, souvent considéré comme un contrepoids au monde occidental, s’est élargi à l’Égypte, à l’Éthiopie, à l’Iran et aux Émirats arabes unis.
L’Arabie saoudite a également été invitée à s’y joindre.
Les pays des Brics représentent 45% de la population mondiale. Ensemble, les économies des membres valent plus de 28,5 milliards de dollars. Cela représente environ 28 % de l’économie mondiale.
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Légende image, Le sommet des Brics se tient cette année à Kazan, en Russie
Des responsables russes ont indiqué que 30 autres pays souhaitaient rejoindre les Brics ou chercher à resserrer leurs liens avec le club. Certains de ces pays participeront au sommet. À Kazan, cette semaine, on s’attend à ce que les Brics représentent la « majorité mondiale ».
Mais outre le fait qu’il offrira à Vladimir Poutine son moment de gloire sur la scène géopolitique, quel sera l’objectif de cet événement ?
Soucieux d’alléger la pression exercée par les sanctions occidentales, le chef du Kremlin espère convaincre les membres des Brics d’adopter une alternative au dollar pour les paiements internationaux.
« Une grande partie des problèmes auxquels l’économie russe est confrontée sont liés au commerce et aux paiements transfrontaliers. Et une grande partie de ces problèmes est liée au dollar américain », explique M. Weafer.
« Le Trésor américain a un pouvoir et une influence énorme sur le commerce mondial, simplement parce que le dollar américain est la monnaie principale de règlement. Le principal intérêt de la Russie est de briser la domination du dollar américain. Elle souhaite que les pays du Brics créent un mécanisme commercial alternatif et un système de règlement transfrontalier qui n’implique ni le dollar, ni l’euro, ni aucune des monnaies du G7, afin que les sanctions n’aient plus autant d’importance. .
Mais les critiques soulignent les différences au sein des Brics. Le mot « sympathie » n’est pas un terme que l’on utiliserait pour décrire les membres actuels.
« D’une certaine manière, c’est une bonne chose pour l’Occident que la Chine et l’Inde ne pourront jamais se mettre d’accord sur quoi que ce soit. Car si ces deux pays étaient vraiment sérieux, les Brics auraient eu une énorme influence », note Jim O’Neill, ancien économiste et chef de Goldman Sachs.
« La Chine et l’Inde font de leur mieux pour éviter de s’attaquer l’une l’autre la plupart du temps. Essayer de les amener à coopérer réellement sur le plan économique est un défi sans fin ».
C’est M. O’Neill qui, au début du siècle, a imaginé l’acronyme « Bric » pour désigner quatre économies émergentes qui, selon lui, devaient être « placées au centre de l’élaboration des politiques mondiales ».
Mais les quatre lettres allaient prendre une vie propre, après que les nations correspondantes eurent formé leur propre groupe Bric – plus tard Brics, lorsque l’Afrique du Sud s’y est jointe. Ils tentent de contester la domination du G7, qui regroupe les sept plus grandes économies « avancées » du monde (Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon et Royaume-Uni).
L’Inde et la Chine ne sont pas les seules à avoir des différends. Des tensions existent entre deux des plus récents membres des Brics, l’Égypte et l’Éthiopie. Et, malgré les discours de détente, l’Iran et l’Arabie saoudite sont depuis longtemps des rivaux régionaux.
« L’idée qu’ils vont tous se mettre d’accord sur quelque chose de substantiel est vraiment absurde », estime M. O’Neill.
Et tandis que la Russie, nourrie par un sentiment anti-occidental, parle de créer un « nouvel ordre mondial », d’autres membres des Brics, comme l’Inde, s’engagent à conserver de bonnes relations politiques et économiques avec l’Occident.
À Kazan, la tâche de Vladimir Poutine sera d’effacer les différences et de brosser un tableau d’unité, tout en montrant à l’opinion publique russe – et à la communauté internationale – que son pays est loin d’être isolé.